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- Affaires municipales -

La « vague rose »

François Renaud

Le 5 novembre dernier, l’élection de Valérie Plante à la mairie de Montréal a provoqué, dans toute la société civile québécoise, ce qu’on pourrait qualifier de « prise de conscience chromatique » en matière de politique municipale : le Québec tout entier serait confronté à rien de moins qu’à une « vague rose ».

Rien qu’à Montréal, pas moins de sept femmes ont été élues pour diriger des mairies d’arrondissement, et cette vague rose a largement débordé les frontières de la métropole, puisque à Longueuil, Brossard, Repentigny, Boisbriand, Sainte-Julie, Berthierville, Rouyn-Noranda, Magog et même à Saguenay, ce sont des femmes qui se sont emparé du symbolique trousseau de clef municipal.

Plus près de chez nous, Mme Sylvie Dionne Raymond était réélue sans opposition à la mairie de East Farnham, tandis que, à Cowansville, Mme Sylvie Beauregard, avec 67 % du vote exprimé, succédait brillamment à M. Arthur Fauteux que la maladie a forcé à quitter le fauteuil de maire qu’il a occupé durant 19 ans.

De fait, même si nous sommes loin d’avoir affaire à un tsunami féminin, le pourcentage de femmes qui accèdent au poste de maire de leur municipalité n’a cessé de croître au cours de la dernière décennie : en 2005, elles étaient 144, en 2009, ça grimpait à 175, en 2013, leur nombre passait à 190 et, en cette année 2017, elles sont 210 à réclamer le titre « d’homme de la situation ». Sachant que le territoire du Québec est composé de 1133 municipalités, le calcul est facile à faire : en 2017, les femmes occupent désormais 18,5 % des postes de maires…

En revanche, dans les familles, elles occupent toujours 100 % des postes de mères, à l’image de Valérie Plante, qui avouait candidement avoir consacré les premières heures de sa journée du 6 novembre « à faire les toasts pour le petit-déjeuner de mes enfants » !

L’Armandie est-elle touchée par cette vague rose ?

Avant le déclenchement des élections, sur les 10 municipalités que compte la région que nous prenons plaisir à surnommer « l’Armandie », 9 avaient des maires et une seule, Notre-Dame-de-Stanbridge, était menée par une mairesse, Mme Simard Gendreault, laquelle a décidé de ne pas se représenter au terme de deux mandats consécutifs. Ainsi, au soir du 5 novembre dernier, le score revenait donc à 10/10 pour les hommes… Et c’eût été impensable qu’il en soit autrement, puisqu’aucune femme n’avait posé sa candidature à l’un des postes de maires.

Est-ce dire pour autant que la politique municipale dans notre région est une affaire de boy’s club  ? En ce qui a trait aux postes de maires, la réponse est claire, c’est oui. Cependant, la politique municipale ne se résume pas aux postes de maires. Chacun de nos conseils municipaux est composé d’un maire… et de six conseillers/conseillères. Et c’est là, au niveau des conseils, que se trame une sorte de révolution subtile que l’on pourrait qualifier plus sobrement de « courant rose ».

À l’exception de Dunham, où la seule conseillère sortante n’a pas été réélue, toutes les autres municipalités comptent des femmes au sein de leurs conseils respectifs : Saint-Armand et Stanbridge East en ont chacune une, Saint-Ignace-de-Stanbridge et Notre-Dame-de-Stanbridge, deux tandis que, avec trois conseillères sur six postes, Canton de Bedford et Stanbridge Station atteignent la parité. Enfin, trois de nos municipalités, soit Bedford, Frelighsburg et Pike River, ont des conseils municipaux où les femmes sont majoritaires, occupant quatre des six postes disponibles. L’exercice mathématique est facile à faire : 24 femmes sur 60 postes… Quarante pour cent de nos conseillers municipaux sont, en fait, des conseillères ! Et si l’on ajoute à ces postes les dix postes de maires détenus par des hommes, on arrive à 24 femmes sur 70 postes, soit 34 %. Sachant que, sur l’ensemble du territoire québécois, 32 % des élus municipaux sont des femmes, l’Armandie n’a donc pas à rougir de ses résultats.

Les héros obscurs de la vie municipale

Là, nous venons de tracer le portrait d’une situation théâtrale, où les maires/mairesses et conseillers/conseillères évoluent sous les projecteurs que forment le regard de l’électorat et des médias. Mais attention ! Tous ceux qui ont frayé dans le monde du spectacle, qu’il soit sportif, artistique ou politique, savent que, derrière les performances lumineuses des vedettes, il y a invariablement le boulot des travailleurs de l’ombre, les efforts de ceux qui œuvrent en coulisses, loin de la lumière, de la notoriété ou de la célébrité.

Derrière 19 des 24 coupes Stanley du Canadien, il y a eu Sam Polock ; derrière les succès de la Compagnie Jean Duceppe, il y a, depuis plus de 40 ans, le travail discret mais acharné de Louise Duceppe, la fille du célèbre fondateur ; derrière le courage et l’acharnement dont a témoigné René Lévesque durant ses longues années de traversée du désert, n’oublions jamais qu’il y a eu le support et les encouragements discrets mais constants de Corinne Côté, la fidèle compagne de notre Premier ministre emblématique.

De la même manière, derrière le brio des maires de nos municipalités, il y a des personnes qui occupent, dans la plus grande discrétion, les postes de « pelleteurs de problèmes » ou de « fabricants de solutions » et qu’on identifie sous le titre de directeur ou directrice général(e).

Ce sont eux, les travailleurs de l’ombre, qui préparent les procès-verbaux et les ordres du jour des réunions du conseil municipal. C’est grâce à leur travail que les citoyens reçoivent leurs comptes de taxes annuels à temps et que les subventions gouvernementales viennent remplir le compte en banque de la municipalité. C’est grâce à leur ténacité que celle-ci arrive à surnager dans l’océan de procédures techniques que les ministères des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire, du Transport, de la Sécurité publique et du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques s’emploient à alimenter, voire à suralimenter.

« Le vrai patron, c’est ma directrice générale ! »

C’est par cette formule laconique dont il a le secret que monsieur Gilles Saint-Jean, maire de Canton de Bedford, résumait l’importance du poste de directeur ou directrice général(e). Or, en Armandie, ces travailleurs de l’ombre dont nous venons d’évoquer l’importance sont, depuis longtemps, des travailleuses de l’ombre.

Moins d’un an avant les dernières élections, ce poste était occupé par une femme dans 8 de nos 10 municipalités, mais c’était avant les démissions de Mme Carole Pigeon, à Stanbridge Station, et de Mme Jacqueline Chislom, à Saint-Armand. Aujourd’hui, même si elles ne sont plus que 6 sur 10, les femmes sont tout de même une majorité à occuper ce poste dans notre région.

En somme, si, en Armandie, l’on devait créer une ligne de métro imaginaire à l’image de celle que Valérie Plante réclame pour Montréal, cette « ligne rose » nous mènerait de Pike River à Frelighsburg, en passant par Notre-Dame-de-Stanbridge, Stanbridge East, Canton de Bedford et Saint-Ignace-de-Stanbridge. Ces stations de métro imaginaires se nommeraient Sonia Côté, Anne Pouleur, Béatrice Travers, Nicole Blinn, Manon Blanchette et Mélanie Thibault…

Mesdames les conseillères, mesdames les directrices générales, au nom de tous les citoyens d’Armandie, le journal Le Saint-Armand vous remercie de mettre un peu de rose dans nos vies !

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