Les cinéastes (dans l’ordre habituel) : Yves Langlois, Guy Édoin, Josée Beaudet, Raôul Duguay, Jacques Godbout, Charles Binamé, André Leduc et Jean Pierre Lefebvre. N’apparaît pas sur la photo : Ève Lamont (Photo : Jean-Pierre Fourez)
C’est pas bien de rire du malheur des autres, n’empêche que…
Dans le journal La Presse du 10 octobre dernier, le chroniqueur Marc Cassivi racontait que, à la soirée d’ouverture du tout nouveau Festival International des Films de Montréal, ses espions avaient dénombré un grand total de… 54 spectateurs, disséminés dans les trois salles de cinéma qui présentaient des films !
Je sais, c’est pas bien de rire du malheur des autres, mais n’empêche que, chez nous, à notre “petit” Festival des films… du Monde de Saint-Armand, notre soirée d’ouverture a fait un bien meilleur score. Comme c’était soir de première, que la tension était à son paroxysme et que notre système de billetterie n’était pas encore tout à fait au point, nous allons devoir faire comme l’a fait le chroniqueur de La Presse et nous fier à nos espions. Comme on sait que dans sa disposition “salle de cinéma”, l’église pouvait accueillir 230 personnes et que la place était bondée, on peut estimer qu’il y avait au moins 216 spectateurs, non ? C’est un beau chiffre rond, 216, vous trouvez pas ? Mais soyons modestes et avouons qu’il y avait peut-être quelques places vides en bordure des allées latérales.Combien de places vides… 20, 30, 50 ? Pour faire un autre beau chiffre rond, disons 54 places vides. Maintenant, si on prend notre premier chiffre rond, 216, et qu’on soustrait notre deuxième chiffre rond, 54, on arrive forcément à un troisième chiffre bien rond : 162.
– Depuis quand est-ce que 216, 54 et 162 sont des chiffre ronds ?
– Depuis qu’ils expriment une réalité bien carrée !
216 spectateurs, c’est exactement quatre fois les 54 spectateurs du FIFM, et 162, précisément le triple. S’il n’y avait peut-être pas 216 spectateurs le vendredi soir à la soirée d’ouverture du Festival des Films… du Monde de Saint-Armand, en revanche, une estimation plutôt conservatrice nous pousse à croire qu’il y en avait nettement plus que 162. En conséquence et en toute humilité, nous pouvons donc conclure que, à sa soirée d’ouverture, le FeFiMoSA a fait entre trois et quatre fois mieux que le nouveau “gros” FIFM ! Pas mal, non, pour un petit festival de film de campagne ? Comme dirait mon ami François Marcotte : « C’est pas pour me vanter, mais vous avez fait une maudite belle job ! »
Brèves de comptoir…
Notre FeFiMoSA n’a pas été qu’une fête populaire autour des films du monde de Saint-Armand, il a également été le prétexte à des aventures humaines plus qu’intéressantes ; je vous en raconte deux…
Aventure n°1 :
Mon ami B, à qui je tends un carton pour le cocktail d’ouverture me regarde, tout pâle : « Je peux pas y aller, mon père va être là ! » Faut dire que B n’a pas vu son père depuis une dizaine d’années. Vous savez peut-être comment ça se passe : un jour on s’engueule. Une bonne engueulade bien laide, puis on se parle plus. Et le temps passe. Une, deux… dix années. C’est bête, mais c’est comme ça. Et ça ne se rattrape plus. Finalement, B est venu au cocktail d’ouverture. Après les discours, je m’approche de son père pour lui serrer la main, et qui j’aperçois ? B, la main sur l’épaule du paternel ! Quand je les invite à emprunter le boulevard Pierre-Foglia pour se rendre au cinéma, ils me regardent tous les deux, et le père me dit : « Comme j’ai déjà vu le film, je vais plutôt aller prendre un verre avec mon fils. » Depuis ce soir-là, ils ont dîné en famille deux fois.
Aventure n°2 :
Le vendredi soir, sous le chapiteau, je fais la connaissance de Sylvie et Michel. Ils prennent un verre et rient de bon coeur : Sylvie vient de retrouver des amis de Saint-Armand qu’elle n’avait pas revus depuis vingt-cinq, peut-être trente ans. Pas parce qu’ils étaient partis au bout du monde, mais simplement parce que, après l’école secondaire, chacun était parti de son côté, aux quatre coins de Saint-Armand. Depuis, les vieux copains d’école ne se sont pratiquement plus jamais revus. Pas parce qu’ils étaient en froid, mais simplement parce que c’est grand en titi Saint-Armand ! Au fil des années, ils s’étaient bien salués de loin, quand ils se croisaient à Bedford ou à Cowansville, mais jamais, comme ce soir, n’avaient-ils pris le temps de s’asseoir ensemble à une même table pour rire comme dans le bon vieux temps. Le lendemain, aux petites heures du matin, au moment de fermer le chapiteau, je les retrouve, toujours d’excellente humeur. Cette fois, c’est Michel qui me confie un petit secret : pour la première fois depuis des lustres, il “ferme la place” pour une deuxième soirée consécutive. Son objectif : faire pareil demain !Le dimanche soir, tandis que la musique festive de Gaji Gadjo embrase l’ambiance, j’aperçois Sylvie et Michel en train de rigoler avec leurs amis d’enfance : tout est en place pour que Michel batte son record. La semaine dernière, j’ai revu Sylvie à Bedford et j’ai appris que Michel n’avait pas atteint son objectif. Il a volontairement quitté le chapiteau à 13h30 du matin (sic !), une heure avant que ça ferme officieusement. « Il aurait pu tenir jusqu’au bout, me confie Sylvie, mais il voulait se garder ce plaisir pour l’an prochain. » Alors, à l’an prochain, amis de Saint-Armand ! Nous aussi nous avons un record à battre : faire une deuxième édition du Festival des Films… du Monde de Saint-Armand !