Robert Benoît, porte-parole du regroupement des citoyens de Sutton
Le 11 septembre dernier, la Cour d’appel du Québec rendait un jugement unanime en faveur de citoyens qui avaient contesté la validité d’un règlement de zonage et d’un règlement de lotissement adoptés par la ville de Sutton. Selon Robert Benoît, principal porte-parole du groupe « cette décision est importante pour Sutton mais aussi pour toutes les municipalités du Québec quant à l’interprétation de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU), et en ce qui concerne le développement durable et l’exercice de la démocratie municipale ». Il convient donc de revenir sur les événements que, en 2015, nous relations dans nos pages.
À la fin de 2014, des membres du conseil municipal de Sutton rencontraient un groupe de promoteurs, gens d’affaires, entrepreneurs et arpenteurs qui leur faisaient connaître leurs doléances au sujet de divers « obstacles au développement ». En mars 2015, le maire Dandenault présentait un projet de modifications des règlements de zonage et de lotissement visant notamment à allonger les chemins et les entrées de cours en région montagneuse, et à en augmenter la pente.
Pour de nombreux citoyens, ce projet modifiait sensiblement la vision du développement résidentiel poursuivie jusque-là par la municipalité alors que, pour le conseil municipal et un certain nombre de promoteurs, cela consistait l’unique possibilité de poursuivre le développement de Sutton.
À l’issue de quelques assemblées houleuses et après qu’une pétition ait circulé dans la municipalité, en août 2016, 22 citoyens déposaient en Cour supérieure une demande de jugement visant à faire annuler les modifications réglementaires votées par les élus ainsi qu’une demande d’injonction afin de leur interdire d’aller de l’avant avec leurs projets de développement domiciliaire. Réunis au sein du Regroupement pour un développement durable à Sutton, ces citoyens estimaient que les modifications apportées aux règlements risquaient de contribuer à la dégradation de l’environnement et du paysage. Selon eux, le conseil municipal n’avait pas le droit de procéder à des modifications réglementaires de cette ampleur sans consulter la population.
Selon Robert Benoît, un des membres du regroupement, le conseil municipal n’a pas agi de manière démocratique, son approche visant à contourner les règles étant discutable. De son côté, le maire estimait qu’il était inacceptable qu’un groupe de citoyens entrave le travail de ceux qui ont été élus pour gouverner. À bien des égards, les enjeux qui opposaient alors le conseil municipal de Sutton et une partie de sa population ressemblent à ceux qui ont actuellement cours dans d’autres municipalités de la région et qui pourraient également essaimer ailleurs au cours des années à venir.
Dans le cas présent, il s’agit d’une problématique touchant les développements domiciliaires en région montagneuse, mais de semblables problèmes pourraient également survenir en milieu forestier sensible, à proximité de cours d’eau ou dans un sanctuaire d’oiseaux migrateurs, par exemple. Les mêmes causes engendrent généralement les mêmes résultats. L’issue du processus en cours à Sutton pouvait donc s’avérer riche en enseignements pour l’avenir du développement de plusieurs municipalités de la région.
Dans un jugement rendu le 5 janvier 2017 par la Cour supérieure, district de Bedford, l’honorable François Tôth, rejetait la requête déposée par les citoyens. Convaincus du bien-fondé de leur cause, ces derniers portaient ce jugement en appel et, le 11 septembre 2018, trois juges de la Cour d’Appel du Québec renversaient le jugement de la Cour supérieure et donnaient entièrement raison aux plaignants. Dans ce jugement, les juges accueillent l’appel du groupe de citoyens et le jugement de première instance, et cassent et annulent les règlements de zonage et de lotissement ainsi que tous les règlements subsidiaires adoptés en 2015 par l’administration Dandenault. La Cour adhère aussi aux propos des appelants : « la complexité du processus rendait invraisemblable une réelle participation démocratique, portant ainsi préjudice tant à leurs droits reconnus par la LAU qu’à ceux protégés par la Charte canadienne et la Charte québécoise ».
Robert Benoît fait remarquer que « cette décision devrait aussi favoriser la mobilisation citoyenne sur les questions d’aménagement du territoire puisqu’elle confirme le rôle crucial des tribunaux comme contrepoids efficace à l’observation nonchalante des lois ».
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