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- Culture -

Yves Langlois, L’œil magique

Raôul Duguay

Raôul Duguay et Yves Langlois

Je connais Yves Langlois depuis une quarantaine d’années. Comme il a été citoyen de Saint-Armand pendant 27 ans, nous nous sommes fréquentés assidument et avons partagé nos conceptions de la vie, de l’art et du monde.

Si j’ai accepté qu’il réalise le film Raôul Duguay, par-delà la Bittt à Tibi*, c’est d’abord et avant tout parce qu’il a été et demeure l’un de mes plus précieux amis. La plupart des gens connaissent l’arbre de ma créativité : ma chanson La Bittt à Tibi. Yves Langlois est une des rares personnes à connaître et l’arbre et la forêt de mon parcours artistique. Témoin intime des différents aspects de ma créativité et de ma vie personnelle au cours de ces nombreuses années, nul ne pouvait être mieux placé que lui pour être l’écho de ma carrière artistique. Comme nous partageons un système de valeurs fondé sur l’ouverture de la conscience, c’est-à-dire sur le respect de l’authenticité dans nos rapports à la nature et dans notre apport à la culture, nous croyons que cet adage écologique fonde notre engagement : La Terre n’appartient pas à l’homme, c’est l’homme qui appartient à la Terre. Tout ce qui arrive à la Terre arrive aux fils de la Terre. Yves étant un artiste complet qui s’est, comme moi, impliqué dans la protection de l’environnement, de la langue française et de l’indépendance du Kébèk, il a su donner à ce film une dimension à la fois familiale, poétique et philosophique.

Yves Langlois est un artisan qui fabrique et met en place la production à travers toutes ses phases : l’idéation, la scénarisation, la production, la réalisation, la caméra et le montage. Mais il est aussi pianiste, harmoniciste, compositeur, slameur et auteur. En plus de nombreux articles dans des journaux, revues et magazines, il a publié deux livres à titre d’auteur et collaboré à la rédaction d’un recueil de nouvelles et de deux essais. Il est fier d’être le père d’une fille, Shakti, dont je suis le parrain.

Parmi les cinéastes kébékois, Yves Langlois est l’un de ceux dont le génie créateur a été largement reconnu ici comme ailleurs. Ses films (une quarantaine) ont été récompensés sur trois continents par une quinzaine de prix et diffusés à Radio Canada, TVA, Télé-Québec, Super Écran, Canal D, TVO et TV5 International ainsi que dans des dizaines de festivals et sur les chaînes de télévision de plusieurs pays.

C’est dire combien je me sens privilégié d’avoir été choisi comme point de mire de son oeil magique car chacune de ses images, minutieusement choisie, révèle l’énergie de l’instant vécu tantôt dans l’exubérance, tantôt dans la pure simplicité. Le film reflète le tourbillon des activités de ma vie. Yves s’amuse à lui donner le sous-titre suivant : « Une année dans la vie d’un artiste octogénaire multidisciplinaire et hyperactif ». En effet, la clairvoyance d’Yves Langlois consiste dans la profondeur et la justesse de son regard sur les personnes dont il brosse le portrait. Détenteur d’une maîtrise en communication et psychosociologie, ce cinéaste a toujours créé des documents qui portent à réfléchir sur la condition humaine. Connaisseur des subtilités du comportement humain, il a le don de mettre en lumière la force des émotions qui gouvernent les individus et particulièrement celles des gens en marge de la société.

Au cours du tournage de Raôul Duguay, par-delà La Bittt à Tibi, je l’ai toujours senti à l’affût du moment et du décor opportuns avant de dire à son équipe : « Moteur ! ». Soucieux de saisir tous les aspects de mon quotidien, il a tourné avec moi plus de 150 heures durant la dernière année en plus des dizaines d’heures qu’il avait déjà accumulées au cours des années précédentes. C’est pourquoi il est parvenu à capter dans l’intimité mon processus de création et à révéler certains secrets de ma vie et de mon inspiration en lien avec ma philosophie de la vie.

Ce documentaire pour Radio-Canada et long métrage pour diffusion en salles est une véritable saga. Il a pris naissance il y a une quinzaine d’années et plusieurs scénarios ont été élaborés. Bien que le film comporte certains éléments biographiques, il n’est pas question ici d’une chronologie linéaire de mon parcours. Il s’agit plutôt d’une trajectoire idéologique que le réalisateur a conçue après avoir fait transcrire et décortiqué 950 pages de verbatim des 150 heures qu’il avait tournées. En dégageant de l’ensemble des séquences celles pouvant tenir lieu de thématiques majeures, Yves a sélectionné, avec intuition, créativité et logique, les moments les plus pertinents et les plus intenses du matériel.

Enfin, grâce au regard pénétrant de ce réalisateur, qui a su cerner et le personnage et la personne en moi, l’essence de ma vie d’artiste ne tient plus dans une seule chanson.

*Visionner la bande-annonce du film :  https://www.artfifa.com/fr/films/raoul-duguay-par-dela-la-bittt-a-tibi

Note de la rédaction

Raôul Duguay, par-delà la Bittt à Tibi, le dernier long métrage d’Yves Langlois, a été projeté pour la première fois lors du Festival international du film sur l’art (FIFA). En raison de la pandémie de COVID-19, le festival a dû se tenir en ligne. « C’était pour moi un honneur que mon film soit sélectionné pour participer à cette prestigieuse compétition internationale » nous a confié le réalisateur. Bien que son œuvre n’ait pas remporté de prix à cette occasion, elle a été très appréciée, notamment par Jacinthe Brisebois, directrice de la programmation du FIFA, et par l’Association des AMIS de la radiodiffusion qui en ont fait leur coup de cœur du Festival.

On pourra également voir le film du 31 octobre au 5 novembre, à l’occasion du 39e Festival Cinéma international Abitibi-Témiscamingue de Rouyn-Noranda. Par la suite, Yves et Raôul ont bien l’intention de venir le présenter en Armandie. On vous tiendra au courant.