Les compagnies ferroviaires qui transportent des produits dangereux doivent désormais faire connaître aux municipalités qu’elles traversent le contenu de leurs cargaisons. Mais il semble qu’elles n’auront pas à le faire à l’avance.
Depuis la tragédie de Lac-Mégantic, les maires de tout le pays exigeaient de connaître la nature des produits dangereux qui transitent sur leur territoire. Jusqu’à présent, Ottawa leur conseillait simplement de faire une demande d’accès à l’information pour obtenir des réponses.
Le 20 novembre dernier, Lisa Raitt, ministre des Transports, annonçait un « changement de cap » en émettant un « ordre préventif » dans le but d’obliger les compagnies à divulguer aux municipalités la nature et le volume du contenu des wagons. Les compagnies canadiennes de classe 1 (CN, CP) transportant des produits dangereux devront faire rapport tous les trois mois, tandis que celles des autres classes, notamment les compagnies étrangères – comme la Montreal Maine and Atlantic (MMA), responsable de l’accident de Lac-Mégantic qui a causé la mort de 47 personnes – n’auront à fournir l’information que sur une base annuelle. Si le contenu des cargaisons change, ce qui se produit fréquemment, les compagnies devront en avertir les municipalités « dès que possible ».
Ainsi, la ministre Raitt n’a eu d’autre choix que d’admettre que la nouvelle mesure ne permettra pas de prévenir d’autres catastrophes. La Fédération canadienne des municipalités estime que c’est un pas dans la bonne direction dans la mesure où cela permettra d’intervenir rapidement advenant une catastrophe, mais son représentant québécois, Jacques Demers, affirme que l’organisation fera pression pour que les compagnies informent les municipalités sur la nature de leur chargement avant que les trains ne s’aventurent sur leur territoire. « Ça fait partie de la prochaine étape », a-t-il assuré.
Bref, le commun des mortels est en droit de se demander si le « changement de cap » de Transport Canada n’est pas une simple opération de relations publiques destinée à donner l’impression que l’on se préoccupe de la sécurité de la population.
Mais encore
Le même commun des mortels pourrait également se demander ce qu’il en est des projets de pipelines destinés à alimenter l’Est du pays en pétrole bitumineux brut provenant de l’Ouest. Malgré ce que certains prétendent actuellement, le transport d’hydrocarbures par pipeline n’est probablement pas beaucoup plus sécuritaire que le convoyage ferroviaire. En 2010, au Michigan, la rupture d’un oléoduc exploité par la pétrolière Enbridge a entraîné le déversement accidentel d’environ 4 millions de litres de brut lourd dans la rivière Kalamazoo. Trois ans et un milliard de dollars plus tard, le nettoyage n’est toujours pas terminé.
Or, le territoire de notre Armandie est bel et bien traversé par des pipelines, et les compagnies qui les exploitent ont des projets d’expansion. Projets avec lesquels le gouvernement québécois ne semble pas entièrement en désaccord. Une de ces compagnies, l’Albertaine TransCanada (propriétaire de pipelines qui traversent notre région), a déjà annoncé son intention de construire un oléoduc qui permettra de transporter le pétrole de l’Ouest canadien jusqu’au Nouveau-Brunswick. Or, entre l’Ouest et l’Est, il y a la Grande Armandie et son sous-sol. Les autorités locales en sont-elles informées ? Sont-elles en faveur ? Et qu’en pense le commun des mortels qu’elles représentent ?