L’Ordre des agronomes du Québec (OAQ) doit combler ce printemps la présidence et la vice-présidence de son conseil d’administration (CA) parce que sa présidente et son vice-président ont récemment annoncé qu’ils quittaient leurs fonctions. Sans présumer des raisons de ces départs, on peut se demander si le CA n’est pas miné par les conflits d’intérêts face à un projet de révision de la Loi sur les agronomes visant à interdire à un agronome de vendre des pesticides alors qu’il fait du service-conseil.
Rappelons que, en 2019, lors des travaux de la Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles qui avait pour mandat d’examiner les impacts des pesticides sur la santé publique et l’environnement, ainsi que d’identifier des solutions de rechange innovantes, plusieurs experts avaient recommandé d’apporter un tel changement. On sait qu’au Québec, la majorité des agronomes qui conseillent les agriculteurs sur leur utilisation des pesticides sont des salariés de fabricants et distributeurs de pesticides.
Dans la foulée de ces travaux, André Lamontagne, ministre de l’Agriculture, déposait en 2022 un projet de loi visant à réformer cette loi. Mort au feuilleton après avoir été présenté juste avant la fin de la session parlementaire, il attend toujours d’être redéposé sans qu’on sache quand ce le sera. Le ministre a plutôt mandaté le Bureau de normalisation du Québec d’élaborer une norme destinée aux entreprises qui offrent des services-conseils en même temps que la vente pour mieux encadrer et baliser ces deux activités. Ce qui donne à penser qu’il n’entend pas interdire une telle pratique. Par ailleurs, l’actuelle présidente de l’OAQ confiait récemment à Radio-Canada qu’elle n’était pas favorable à l’idée d’interdire à un agronome de vendre des pesticides alors qu’il fait du service-conseil.
En fait, il semble que les agronomes québécois soient divisés sur ces questions. En 2019, Louis Robert, l’agronome lanceur d’alerte aujourd’hui retraité, avait presque réussi à se faire élire à la présidence de l’Ordre. Lui qui recommandait d’interdire aux agronomes conseils de vendre des pesticides avait recueilli 49,6 % des voix contre 50,4 % pour Michel Duval, le président sortant de l’époque, qui était d’avis contraire.
Il y a quelques jours, le CA de l’Ordre confirmait la nomination de Benoît Pharand au poste de directeur général de l’organisation professionnelle. Or il se trouve que cet homme est un lobbyiste connu de l’industrie agrochimique. À suivre…