Le Popillia japonica, de son nom latin, aurait été aperçu pour la première fois au New-Jersey en 1916. Depuis, il s’est multiplié et est devenu extrêmement nuisible sur notre continent, alors qu’il ne semble pas présenter de problèmes graves dans son pays d’origine. L’absence de prédateurs indigènes de même que l’omniprésence des pelouses (riches en graminées, dont les racines constituent la nourriture préférée des larves) expliqueraient son expansion.
Pour limiter celle-ci, des entomologistes américains ont, dans les années 1920 et 1930, importé d’Asie plusieurs espèces de guêpes parasitoïdes et de mouches prédatrices réputées s’y attaquer. Parmi les premières, Typhia vernalis s’est facilement adaptée et s’est répandue dans tout le nord-est des États-Unis de même que dans certaines parties du Canada. Dans certains endroits, on a observé une prédation de 60 % des larves présentes dans le sol. Cette petite guêpe est active du début à la fin mai, période où, justement, les larves du scarabée japonais ont atteint leur taille maximale et remontent à la surface du sol. Après l’accouplement, la femelle s’enfouit dans le sol à la recherche de larves. Quand elle en a trouvé une, elle la paralyse momentanément en la piquant puis, avec une précision chirurgicale, dépose un œuf sur son ventre exactement entre le troisième segment thoracique et le premier segment abdominal. Au bout de 9 à 10 jours, l’œuf se transforme en larve qui, bien fixée à sa proie, s’en nourrit et la tue.
Parmi les mouches prédatrices qu’on a importées d’Asie, I’Istocheta aldrichi semble être particulièrement efficace. Contrairement à la guêpe, c’est l’adulte qu’elle attaque, en pondant ses œufs sur sa tête. Ses larves parasitent leur hôte et le dévorent vivant de l’intérieur. Si les conditions sont bonnes, la mouche s’installera pour de bon au jardin, au verger ou au vignoble. Pour l’attirer et la garder, on recommande de semer des plantes de la famille des ombellifères ou apiacées (aneth, carotte, céleri, persil, panais, fenouil, coriandre, livèche, etc.), dont elles apprécient particulièrement le nectar, mais aussi diverses autres plantes à fleurs.
Ces insectes ne sont pas offerts dans le commerce. Mais comme ils sont présents dans l’environnement, il y a de fortes chances qu’ils finissent par repérer les endroits où abondent leurs proies, comme le verger de Manon et Kevin, par exemple (voir article, page 15) et s’y installent à demeure. D’où l’importance de favoriser leur établissement en encourageant la diversité (plantes à fleurs, arbustes, arbres variés) et en limitant autant que possible l’emploi de pesticides.
Cette approche est de loin la plus intéressante puisqu’elle vise à établir un équilibre écologique durable. À la longue, prédateurs et proies trouveront naturellement leur place dans l’écosystème plus vaste du jardin, du vignoble ou du verger.
Cependant, entre-temps, voici quelques autres solutions visant à limiter les dommages causés par cet insecte, fort joli il faut le reconnaître, mais ô combien nuisible :
- Si possible, réduisez la taille de votre pelouse et évitez de planter des graminées, histoire de priver les larves de leur nourriture préférée.
- En cas d’attaque massive, retournez la terre à l’automne afin d’exposer les larves aux prédateurs potentiels.
- Taupe, musaraigne, crapaud, raton laveur, moufette et oiseaux (notamment le quiscale, l’étourneau, le cardinal et le moqueur chat) se délectent littéralement des larves. Les poules et les canards aussi, d’ailleurs. Même si certains risquent de faire quelques dégâts à votre pelouse, ce sont généralement de bons alliés du chasseur de scarabées.
- Tôt le matin, en soirée ou quand le ciel est couvert, recueillez les adultes en les faisant tomber dans un sceau contenant de l’eau à laquelle vous aurez ajouté un peu de savon à vaisselle. Vous pouvez aussi les récolter avec un aspirateur portatif.
- Le BTG (Bacillus thuringiensis galleriae) est efficace contre tous les stades de maturation de l’insecte. Malheureusement, il n’est pas encore homologué au Canada. Mais il y a de l’espoir puisque GrubGone, le produit commercial, a été soumis à l’ARLA (Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire) pour fin de révision par le Centre de la lutte antiparasitaire ou le titulaire d’homologation.
- Le Bacillus popilliae, responsable de ce qu’on appelle la maladie laiteuse chez les larves, et que l’on a distribué à grande échelle aux États-Unis de 1939 à 1951, ne serait en fait pas d’une très grande efficacité d’après les résultats d’études menées récemment. On en trouve tout de même aux États-Unis, mais pas au Canada.
- Divers nématodes entomopathogènes sont efficaces dans le contrôle des larves non seulement du scarabée japonais, mais aussi de celles du scarabée du rosier, du hanneton commun, du charançon noir de la vigne, de l’altise, de diverses mouches, dont celle de la carotte, etc. Pour en savoir plus sur ces prédateurs microscopiques, consultez le site de l’entreprise Anatis bioprotection (http://anatisbioprotection.com/produits-lutte-biologique/).
- Les résultats obtenus avec les pièges à phéromones sont mitigés : certains affirment qu’ils sont très efficaces, d’autres que, au contraire, ils attirent plus de scarabées qu’ils n’en détruisent. L’observation attentive des plantes à proximité devrait vous indiquer s’il faut les garder ou les jeter.
- Le PyGanic, insecticide à base de pyrèthre accepté en agriculture biologique, est efficace contre les adultes, mais gardez à l’esprit que c’est un produit de dernier recours car, comme bien d’autres insecticides, il tue autant les insectes bénéfiques que les indésirables. L’huile de margousier (neem) et le savon insecticide sont également employés avec plus ou moins de succès.
- Vous pouvez aussi protéger vos plantes à l’aide de couvertures flottantes ou de filets conçus à cette fin.