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Sur les trois photos, on peut voir des Italiens de Montréal en visite dans la petite Italie de Philipsburg Photos : Archives De La Famille Di Ninni
Pendant les premières décennies du XXe siècle, de 1900 à 1955, on pouvait apercevoir une douzaine de maisons agglutinées autour d’une carrière et d’une usine de transformation de la pierre et du marbre, qui étaient extraits de la mine exploitée sur place par la Wallace Sandstone Co. et plus tard par la Missisquoi Stone & Marble Co. Cette carrière était réputée être la plus importante au pays.
Cet ilôt était situé à un kilomètre au nord-est du centre du village. Ces habitations abritaient autant de familles d’origine italienne issues de la grande vague d’immigration vers l’Amérique du début du siècle.
Plus que modestes, ces maisons que la Compagnie avait bâties, étaient louées à prix modique. Elles étaient dotées d’eau courante et d’électricité, mais n’avaient pas de salle de bain, situation commune à cette époque.
Qui étaient ces gens ?
Ils provenaient de différentes régions de la péninsule italienne qu’ils avaient quittée, à l’instar de tous les immigrants d’alors, à la recherche de conditions de vie moins pénibles que celles qui sévissaient en Europe.
On y retrouvait les Piccoli de la Vénétie, les Angeli, les Gentile, les Massari, les Micocci et les Rosetti de l’Ombrie, les Marziali des Marches, les Caruso, les Castoro, les Della Porta, les Di Narzo, les Di Ninni, les Fiocco et les Tassoni des Molises, Campobasso.
Selon la croyance populaire, étant reconnus maîtres d’œuvre dans le traitement de la pierre et du marbre, les Italiens se seraient établis à Philipsburg pour y pratiquer leur métier. Il n’en est rien ; c’était plutôt des artisans, des commerçants et, surtout, des ouvriers agricoles.
Les témoins de cette époque peuvent affirmer que ces gens étaient laborieux et débrouillards. Aucune tâche, même les plus ardues et les plus ingrates, ne les rebutait.
Et que dire de leur ingéniosité ! Autour de leurs modestes demeures, ils réussissaient à arracher à la broussaille un lopin de terre arable d’où jaillissaient de plantureux potagers. Ils élevaient de discrets abris où ils gardaient des poulets, des pigeons, des lapins et même des chèvres et des porcs. En authentiques Italiens, ils fabriquaient leur vin que l’on conservait dans des caves creusées à même le sol et bien isolées. Tout cela sous les regards admiratifs et parfois envieux des villageois.
Dans un Philipsburg multiethnique, ces italiens vivaient en bonne harmonie avec leurs concitoyens de cultures, de langues et de religions différentes. Point n’était besoin d’une commission d’enquête sur les accommodements raisonnables, eux les vivaient sans heurts au quotidien, au travail, dans les loisirs et autres sphères d’activités.
On ne peut pas passer sous silence la joie de vivre qu’ils avaient apportée de leur terre natale et qui était ancrée dans les cœurs et les âmes de ces méridionaux. Si par un beau jour d’été un passant se retrouvait non loin de ce quartier qu’on appelait la carrière, il pouvait entendre de la musique, des chants, des vociférations pas toujours très catholiques. La boustifaille et le vin n’étaient pas étrangers à ces explosions de joie. Toute cette exubérance cachait la nostalgie du pays au ciel bleu de leur enfance.
À ce jour, aucun vestige identifiable de cette époque ne subsiste. Cependant, dans la région, si vous entendez des noms à consonances italiennes, il y a fort à parier qu’ils sont portés par les enfants, les petits-enfants ou les arrière-petits-enfants de ces pionniers.
Luigi Di Ninni est natif de Philipsburg et depuis toujours résident saisonnier de ce magnifique patelin.