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- L'Histoire en feuilletons -

La Bataille des Plaines d’Abraham

La demi-heure qui a changé le monde
Guy Paquin

Cette gravure de 1797 s’inspire d’une esquisse exécutée par Hervey Smyth, aide-de-camp du général Wolfe durant le siège de Québec. Vue de la prise de Québec le 13 septembre 1759.

Chapitre 4 : Le général Wolfe et le laudanum (suite de la semaine dernière)

 « Vous plaisantez, Howe. » « Non, amiral. Wolfe est encore alité et ne veut plus voir personne. Rhumatismes, parait-il. »

« Rhumatismes ? Je vous en foutrai, moi, des rhumatismes ! Ce qui le rend malade, c’est la honte ! Et c’est pour ça qu’il ne veut voir personne. » « Vous êtes bien sévère. »

« Ah oui ? Ça fait 2 mois et demi que nous sommes là. Deux mois et demi ! Et avec quel résultat ? À la fin juillet, notre génie militaire s’installe sur la rivière Montmorency. Il a 2000 hommes avec lui. Eh bien, ils sont attaqués par des Wendats et quelques miliciens canadiens, aussi bien dire des chasseurs de lapins. »

« Tout de même, Saunders, les Wendats ne sont pas des amateurs. » « OK, je vous concède ça. Des chasseurs de chevreuils. Ça vous va ? Wolfe est attaqué et il réussit à perdre 150 soldats. Cent-cinquante bons Britanniques, tués. Notre fonds de commerce, Howe. Et il échoue à traverser la rivière.

James Wolfe par Joseph Higmore (1692-1780)

« Le 31 juillet, cinq jours après, Wolfe attaque une redoute française près de la rivière. »

« Soyez honnête Saunders. Cette redoute, Wolfe l’a prise. »

« Il a dû l’abandonner 45 minutes plus tard, quand les Français ont contrattaqué. Et, au final, Wolfe est chassé de la redoute. Il bat en retraite avec 450 hommes en moins ! Bilan d’une semaine de combats : 600 Britanniques perdus. Il devrait diriger un abattoir au lieu d’une armée. Ça marcherait rondement ! »

« Moi, amiral, ce qui m’inquiète, c’est la santé de nos hommes. Les fièvres, le scorbut et je ne sais quoi encore. Il faut vite en finir avant que la maladie n’emporte tout le monde. »

« Et dire que pendant que nous causons, Wolfe se gargarise au laudanum. »

« Laudanum ? Vous m’excuserez, je ne suis pas apothicaire. Qu’est-ce que c’est ? »

« Le laudanum, mon cher… »

« Excusez-moi, Saunders, on a frappé. Ah ! Holland ! Entrez mon vieux. Pas besoin de présentations, vous connaissez bien l’amiral Saunders. » « Amiral, mes respects. »

« Je suis content de vous voir, Holland. Pas de chichi entre nous. La carafe de vieux porto est sur la petite table avec les verres. » « Je ne sais pas si je dois… » « Et bien moi, je sais. Passez-moi la carafe et prenez-vous un verre. Howe, votre verre. Voilà. Quand les verres sont pleins, il n’y a plus d’amiral, de colonel ou de protocole. »

« Je viens de quitter le général Wolfe, Messieurs. Il a un nouveau plan dont il est fort entiché. »

« Un plan qu’il a trouvé dans un verre de laudanum, comme tous ses autres plans. »

« Quelqu’un va-t-il enfin me dire ce que c’est que le laudanum ? » « En gros, mon cher Howe, c’est de l’opium. En suspension dans de l’alcool. Wolfe en prend pour chasser la douleur rhumatismale. » « Et c’est la source de ses plans militaires. »

« Amiral, je vous aime bien mais pas quand vous cassez du sucre sur le dos du général. Ou que vous lui faites des menaces. »

L’amiral Saunders, par Richard Brompton (1734-1783)

« Menaces, Saunders ? » « J’ai rencontré votre Monsieur Wolfe le 28 août dans ses quartiers et je lui ai remis les yeux en face des trous. Je lui ai rappelé ma mission : amener les vaisseaux et les soldats dans la rade de Québec. C’est fait. Puis, ramener en Angleterre ma quarantaine de vaisseaux avec les survivants. J’ai dit à Wolfe qu’il n’était pas question que je lève l’ancre au milieu d’octobre. Ça m’obligerait à affronter les tempêtes d’automne dans l’Atlantique Nord. L’enfer, version liquide. Je lui ai donné une semaine. »

« Saunders, n’oubliez pas que vous avez réitéré votre menace il y a deux jours. »

« C’est vrai. Et notre Jules César m’a regardé, les yeux ronds, effaré. Sans doute un effet de la maladie…ou du remède. Lequel des deux, à votre avis, Holland ? »

« Ni la maladie, ni le remède. La surprise de recevoir des menaces de quelqu’un qui devrait être son allié. Le général Wolfe vient de me faire part de son nouveau plan. Il vous l’expliquera au moment opportun. Mais ce que je peux vous dire c’est qu’il vaincra ou qu’il mourra. Il me l’a dit lui-même et avait cessé sa médication. Les rhumatismes l’ont laissé. »

« La victoire ou la mort ? » « Exactement. »

 

 

 

 

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