En juillet dernier, le sénateur républicain Marco Rubio demandait à l’administration Obama de déclarer l’état d’urgence dans l’état de la Floride. La raison ? Briser le silence qui règne autour de la prolifération des algues bleu-vert dans cet état et, surtout, de l’inaction globale vis-à-vis de cette situation. Par endroits, les rivières et les grands réservoirs d’eau situés à l’intérieur de la péninsule seraient si affectés qu’aucune activité nautique ne serait plus possible.
On parle alors de renforcer certaines digues, d’entreposer de l’eau contaminée dans d’immenses réservoirs, de confiner le problème. Au nom de l’économie locale. Mais est-ce vraiment la solution ? Colmater les brèches, atténuer les symptômes, dédommager les victimes immédiates.
Le problème est évidemment ailleurs. En Floride comme ici, le grand coupable, c’est le phosphore. Et d’où vient-t-il ? En Floride comme ici, il vient des engrais agricoles que les cultivateurs sont aujourd’hui forcés de mettre dans leurs champs pour maintenir un niveau de productivité qui répond aux besoins et aux normes du marché international. Et celles-ci, on le sait, sont dictées par une logique qui a désormais montré ses limites. Celle d’une production qui détruit ce qui l’entoure.
À qui jeter la pierre ? Certainement pas aux agriculteurs. Comme la plupart d’entre nous, ce sont aussi les otages de cette situation. Le problème est beaucoup plus complexe, il remonte plus haut dans la chaîne alimentaire des grandes politiques. C’est pourquoi il ne reste plus qu’à se tourner vers ceux qui nous gouvernent.
Les algues bleu-vert sont la conséquence d’un phénomène bien simple. La population locale n’a aucun pouvoir sur son environnement immédiat. Bien sûr, une multitude d’actions sont en cours pour tenter de renverser la vapeur, de corriger la situation, mais tant que la pratique actuelle de l’agriculture à grande échelle sera maintenue sous cette forme, nos efforts seront vains.
Il ne s’agit pas ici de tomber dans un cynisme paralysant, mais plutôt de saisir l’étendue du problème. Alors que Québec et Ottawa se renvoient la balle sur plusieurs dossiers environnementaux, à savoir à qui revient la responsabilité, à qui revient d’agir et comment ou, encore, à qui incombe la tâche impopulaire de réglementer, ce sont les citoyens et l’économie locale qui sont aux prises avec le problème.
« Ne buvez pas cette eau. Ne vous baignez pas dans ce lac. Éloignez les enfants de l’écume et de la plage. Lavez-vous les mains après avoir touché l’eau. Évitez de consommer le poisson. »
À l’heure où des voix politiques se lèvent enfin, ici et ailleurs, pour dénoncer la gravité de la situation, il est déjà tard. Le budget des organismes qui ont pris en charge le cas des algues bleu-vert est nettement insuffisant, le manque de coordination des volontés politiques est criant et nulle législation n’est prévue pour diminuer l’utilisation du phosphore à la source, en contraignant les industries concernées.
Tout est encore à faire. Et même pire.
Il faut plus.