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« Maïs »… comme dans « Maman »

Paulette Vanier

« Source de vie », « Mère universelle », « Notre Chair », « Grain divin », « Notre Mère Maïs », ces noms ont servi tour à tour à désigner le maïs chez les diverses peuplades de l’Amérique centrale et du Sud, pour qui cette céréale constituait le pilier même de l’existence. D’aucuns font remarquer que le mot « maïs » (qui vient du caraïbe mahis) n’a pas été choisi au hasard mais en référence à la racine phonétique « ma », qui, dans bon nombre de langues sur la planète, désigne la Mère dans toute sa puissance créatrice.

On ne s’étonnera donc pas que le maïs soit à l’origine de nombreux mythes créateurs. Pour les Mayas, l’humanité telle que nous la connaissons est le résultat d’améliorations survenues au cours d’une série d’ères successives : d’abord faite d’argile, la chair des humains a ensuite été taillée dans le bois avant d’être finalement façonnée avec de la farine de maïs à laquelle les dieux ont ajouté leur propre sang, donnant ainsi naissance au peuple du maïs, lequel possédait toutes les qualités qui  manquaient aux humains des ères précédentes.  Pour les Aztèques, l’amélioration de l’espèce humaine s’est produite au fil d’une succession de cinq ères, caractérisée chacune par une nourriture particulière : dans la première, ils mangeaient des châtaignes et des fruits, dans la seconde des pignons, dans la troisième une variété de millet, dans la quatrième, le téosinthe, ancêtre sauvage du maïs, et dans la cinquième, le maïs cultivé, céréale qui s’avéra capable de répondre à leurs besoins fondamentaux et de permettre leur épanouissement.

Quant aux anthropologues et aux ethnologues modernes, ils associent le fabuleux développement des civilisations précolombiennes du Mexique, de l’Amérique centrale et de l’Amérique du Sud à cette céréale, qui constitue probablement la plus remarquable des réussites en terme d’amélioration agricole. Car non contents de la cultiver, les Amérindiens l’ont amenée par le jeu de nombreuses sélections à un degré de productivité qu’aucune des céréales du Vieux Monde – blé, riz, sorgho, orge, seigle – n’a jamais égalé.

On est donc en droit de se demander comment il se fait que cette plante qui a joué un rôle fondamental dans l’histoire humaine et pour laquelle on a créé des centaines de plats (on parle de 600 rien qu’au Mexique) soit aujourd’hui essentiellement cultivée pour engraisser le bétail ou à des fins industrielles ? Car c’est un fait que seulement 15%de toute la production mondiale sert à nourrir les humains. Quand et pourquoi le maïs a-t-il été détourné de sa fonction de Mère universelle pour être donné en nourriture aux pourceaux ? C’est ce que nous tenterons de comprendre dans le prochain épisode…

Vous gardez précieusement les semences d’une (ou de plusieurs) variété de légume qui se transmet dans votre famille de génération en génération ? Vous aimeriez la faire connaître à vos concitoyens de Saint-Armand, voire leur en offrir ? Écrivez-nous au Journal, nous transmettrons l’information.