On projette de construire sur le chemin Dutch une usine de fabrication de granules combustibles à partir du panic érigé, une graminée indigène vivace qui serait cultivée sur des terres marginales de la région.
Le panic érigé (Panicum virgatum), c’est une sorte de foin très robuste dont les racines s’enfoncent profondément dans le sol pour aller chercher les nutriments nécessaires à sa croissance, quel que soit le type de sol et en dépit des conditions climatiques. Il semblerait donc que ses besoins en engrais soient minimes, voire nuls. Comme c’est une plante vivace, elle repousse chaque année sans qu’il soit nécessaire de procéder à des semis annuels. Selon les experts consultés, sa culture ne nécessite pas ou peu d’herbicides pour contrer l’envahissement par les mauvaises herbes. On cultive le panic comme fourrage pour les animaux et on emploie sa paille comme litière ainsi que pour la construction de bâtiments en ballots. En protection environnementale, la plante est utile pour prévenir l’érosion des sols, notamment sur les berges des cours d’eau. Un atout majeur en cette période où l’on doit trouver des solutions pour empêcher la prolifération des cyanobactéries dans nos cours d’eau.
Avec la paille du panic, on peut aussi fabriquer des granules combustibles pour alimenter les poêles à granules destinés au chauffage de bâtiments agricoles (serres, étables, poulaillers, etc.), institutionnels (écoles, hôpitaux, etc.), commerciaux (magasins, usines, bureaux, etc.) ou résidentiels. Comparé à l’huile à chauffage, ce type de combustible permettrait, selon les estimations des experts, d’économiser jusqu’à 30 %sur les coûts de chauffage et de réduire de 90 % les émissions polluantes.
Ingrid Marini, fille de cultivateurs de Pike River et aujourd’hui résidente de Saint-Armand, a eu l’idée d’implanter ici une usine de fabrication de granules de panic. Parmi les autres promoteurs, on compte son conjoint, Luc Marchessault (notre inspecteur municipal), Richard Désourdy (cultivateur et conseiller municipal à Saint-Armand) et Normand Caron, un cultivateur de la région de Valleyfield connu comme un pionnier de la culture du panic au Québec.
Les promoteurs (Biocombustible international inc.) prévoient des investissements de l’ordre de 2,3 millions de dollars et la création d’une douzaine d’emplois, d’ici 2011. Ils estiment qu’entre 2009 et 2011, l’usine atteindrait un volume de production de quelque 50 000 tonnes de granules par an. À terme, l’usine fonctionnerait à l’année, 24 heures par jour, 7 jours par semaine. Dans leur plan original, les promoteurs souhaitaient la construire près de la route 133 mais, ayant des difficultés à trouver un terrain dans ce secteur, ils ont finalement opté pour une terre agricole du chemin Dutch appartenant actuellement à Nathalie Chalifoux, la conjointe de Richard Désourdy.
Lors de l’assemblée du conseil municipal tenue le 4 septembre dernier, le maire et les conseillers adoptaient une résolution appuyant une demande présentée à la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) en vue de modifier le lotissement de la ferme de Nathalie Chalifoux pour permettre d’y construire l’usine.
Par la suite, le Comité consultatif d’urbanisme (CCU) de Saint-Armand était saisi du dossier et déposait, le 1er octobre, une recommandation à l’égard de ce projet. En substance, le CCU se dit très favorable dans l’ensemble, soulignant les aspects environnementaux positifs d’une telle entreprise, les possibilités de revenus diversifiés pour les agriculteurs du coin et la création d’emplois locaux, mais recommande par contre d’implanter l’usine aux abords de la 133, un lieu qui constitue déjà un secteur industriel et commercial naturel sur le territoire de la municipalité.
Sur le tronçon du chemin Dutch qui va du chemin Saint-Armand à Bedford, on compte environ 120 résidences (près de 60 sur le territoire de Saint-Armand, une trentaine dans Bedford-Canton et autant dans la ville de Bedford). Combien de camions et autres véhicules lourds emprunteront quotidiennement cette route pour acheminer les ballots de paille vers l’usine et les 50 000 tonnes de granules vers les marchés auxquels on les destine ? Cette information manque au dossier pour l’instant. De son côté, le CCU recommande à la municipalité d’aider les promoteurs à trouver un emplacement approprié.